L’euthanasie ou la dernière tentation du « Sauve-toi toi-même »

Personne en EHPAD

Dans l’Evangile selon saint Luc, Jésus crucifié entend à trois reprises les chefs des prêtres, le peuple assemblé puis le mauvais larron lui dire « Sauve-toi toi-même ». Cette dernière tentation consiste à renier sa mission, celle qui est inscrite dans son nom même : Jésus, c’est à dire « Dieu sauve ».  Et voici qu’au lieu de sauver les hommes – « quand j’aurai été élevé de terre, j’attirerai à moi tous les hommes » (Jn 12,32) – il se sauverait lui-même.

Une grande humilité

La demande d’euthanasie constituera sans doute, après sa légalisation probable en France, une ultime tentation pour beaucoup d’entre nous : planifier notre mort alors même que nous sommes invités à nous abandonner dans les bras du Père. Un médecin belge en soins palliatifs, partisan de l’euthanasie, me confiait : « Vous savez, les patients qui demandent l’euthanasie ont tous le même profil. Ils veulent rester dans le contrôle ».

Ce sujet de la fin de vie nous invite à une grande humilité. Confrontés à la souffrance physique ou psychologique, à la solitude et à l’angoisse, quelle sera notre attitude dans le combat final, l’agonie ? Thérèse de Lisieux n’a-t-elle pas elle-même songé au suicide dans les derniers mois de sa vie marqués par la maladie et la nuit de la foi ?

Prier pour les agonisants

Alors, que pouvons-nous faire ? D’abord prier pour les agonisants. « Si je n’avais pas eu la foi, je me serais donné la mort sans hésiter un seul instant » écrit sainte Thérèse. Demandons pour les mourants la grâce d’une bonne mort par l’intercession de Saint Joseph. Pas une mort rapide, impromptue et sans douleur mais une mort vécue dans l’abandon et l’espérance, munis des sacrements et en présence des proches. Soyons convaincus qu’à l’heure de notre mort, au cœur du combat, la grâce surabonde.

Je me rappelle d’une patiente hospitalisée dans un état grave. Elle avait reçu la visite d’une étudiante de l’aumônerie qui avait frappé à la porte de sa chambre. La patiente l’avait accueillie et avait décidé ensuite de se confesser et de communier alors qu‘elle ne s’était plus rendue à l’église depuis trente ans. Elle s’était éteinte quelques jours plus tard dans la paix et la foi à la stupéfaction de son entourage.

Secours et consolation

L’évolution législative prochaine sur la fin de vie nous incite particulièrement à réfléchir à l’accompagnement des personnes âgés et à celui des personnes en fin de vie, à commencer par nos proches. Nous nous sommes habitués à cantonner les personnes âgées en EHPAD et à ghettoïser la mort à l’hôpital. Sommes-nous prêts à envisager d’accueillir nos parents dépendants chez nous ? « J’étais malade, et vous m’avez visité » (Mat 25,36). Aidons les mourants à ne pas céder au désespoir.  Les aumôneries des hôpitaux et des EHPAD constituent un beau lieu d’engagement pour accompagner les malades en fin de vie. Les soignants sont souvent disposés à orienter les membres de l’aumônerie vers les malades qui attendent secours et consolation.

Cette évolution sociétale basée sur une « pitié fallacieuse » (Jean Paul II) constitue un nouveau défi pour notre communauté et chacun d‘entre nous. Relevons-le sans crainte mais dans l’espérance et la confiance en Dieu : « Retrouve ton repos, mon âme, car le Seigneur t’a fait du bien. Il a sauvé mon âme de la mort, gardé mes yeux des larmes et mes pieds du faux pas. » (Psaume 114).

Famille chrétienne, François d’Aunis, 7 mai 2024