Développement de la participation de médecins généralistes et de l’éducation thérapeutique pour la prise en charge des couples infertiles
Publié en anglais dans European Journal of Obstetrics & Gynecology and Reproductive Biology.
Auteurs :
Gaelle Bernot MD, IIRRM
Laure Lallemand MD, Clinique Sainte Félicité
Christel Le Menager MD, IIRRM
Rene Ecochard MD, PhD Université Claude Bernard, Lyon I
Mots-clés : Infertilité ; Parcours de soins ; Médecin Généraliste ; Éducation thérapeutique
Introduction
Le parcours de soin des couples consultant pour infertilité est généralement long et éprouvant. Il fait intervenir des gynécologues, andrologues, endocrinologues, psychologues, diététiciens, et d’autres spécialistes de la procréation médicalement assistée. On s’inquiète actuellement du taux important d’abandon des soins par les couples1. De plus, à l’heure où la décision partagée semble devoir être plus systématique2,3, on constate une grande ignorance des patients concernant la fertilité et le cycle féminin4,5.
Parmi les actions visant à pallier à ces difficultés on aborde ici celle qui consiste à former des médecins généralistes et des instructrices/instructeurs en fertilité. Dans des pays où cela est fait, les médecins généralistes ainsi formés ont été jugés aptes à initier la prise en charge et à guider le couple dans son parcours6,7. L’instructrices en fertilité pratique une éducation thérapeutique. Elle prépare la femme aux consultations médicales et l’accompagne tout au long du traitement de son infertilité8. Cet accompagnement a lieu avant, pendant et après la prise en charge en milieu spécialisé9,10.
Les tenants de cette démarche donnent une place centrale au tableau du cycle tenu par la femme. Sur ce tableau, la femme note les jours de survenue et les caractéristiques des saignements et des écoulements de glaire à la vulve. Avec l’aide d’une instructrice, il est possible d’obtenir un tableau de haute qualité11–13. Ce tableau s’est révélé être un outil précieux pour diagnostiquer les troubles du cycle menstruel14,15. Il peut être utilisé par les médecins pour a) le diagnostic, b) le choix des jours optimaux pour les prélèvements sanguins et les autres procédures diagnostiques, c) l’administration des médicaments et d) le suivi de l’amélioration progressive du cycle à l’issue des traitements. Il peut également être utilisé par le couple pour identifier les jours où une conception est plus probable16.
FertilityCare Centers International, fondé en 1999, est le réseau de formation de médecins et d’instructrices pour l’infertilité le plus ancien16. Les modalités de diagnostic et de traitement sont connues sous le terme NaproTechnology9,17. D’importantes séries de cas de patients traités ainsi ont été publiées10-12. Cependant, à ce jour, aucune publication n’a décrit la participation des généralistes et des instructrices dans le parcours de soin de l’infertilité. Dans cet article, nous décrivons 1) son déploiement en France, 2) l’intérêt des médecins pour le tableau de fertilité recueilli par la femme grâce à l’instructrice, et 3) les résultats du parcours de soins de l’infertilité.
Matériels et méthodes
Données
Les 89 instructrices françaises formées pour l’éducation thérapeutique en fertilité, certifiées par FertilityCare International, ont été contactées par courrier en juin 2024 et interrogées sur 1) leur profession, 2) leur année de formation initiale à cette éducation thérapeutique en matière d’infertilité, 3) leur âge au moment de la formation initiale et 4) leur région d’exercice en France. 66 (74%) ont répondu au questionnaire envoyé.
Les 15 médecins travaillant sur le territoire français et ayant reçu une formation complémentaire par FertilityCare International ont été interviewés sur l’utilité de cette éducation des femmes pour leur pratique médicale dans cinq domaines : 1) aide au diagnostic, 2) moment du cycle où les examens complémentaires doivent être pratiqués, 3) moment du cycle où les médicaments doivent être pris, 4) observation de l’efficacité du traitement sur le cycle, 5) et globalement, la compréhension par la femme de sa conduite à tenir. Les médecins étaient invités à donner leur point de vue sur l’utilité de l’éducation thérapeutique et du tableau du cycle dans ces 5 domaines (1 pour peu utile, 5 pour très utile). Ils étaient ensuite invités à les classer par ordre d’importance (1 pour le moins important, 5 pour le plus important).
Les dossiers de tous les couples ayant reçu une éducation thérapeutique par les 66 instructrices entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2023 ont été analysés pour cette étude. Cette étude utilisant les dossiers tenus pour la pratique ordinaire de soin respecte les principes et la règlementation française de l’éthique de la recherche. Aucune donnée directement ou indirectement nominative n’a été utilisée pour cette étude.
Lors de la consultation initiale, l’instructrice avait noté l’âge des deux membres du couple et les antécédents gynécologiques de la femme : gravidité, parité, antécédents de fausse couche, d’interruption de grossesse, d’avortement médical ou de mort fœtale in utero, traitement antérieur par des techniques de procréation assistée (fécondation in vitro) et durée des tentatives de conception (en nombre d’années). Après quelques semaines de formation aux questions de fertilité et d’apprentissage de l’enregistrement du flux menstruel quotidien et des caractéristiques de la glaire vue ou ressentie à la vulve selon les règles du système FertilityCare18 les couples avaient consulté un des médecins9.
L’instructrice avait ensuite noté la date de chaque conception. Pour chacune d’entre elles, les détails de l’issue de la grossesse ont été enregistrés : grossesse extra-utérine, perte de grossesse avant 12 semaines de gestation, perte de grossesse après 12 semaines de gestation, mortinaissance ou naissance en bonne santé.
Analyse statistique
Déploiement des médecins et instructrices formés
Des cartes ont été utilisées pour montrer l’évolution de la couverture des territoires français en trois périodes successives : 2010 à 2017, 2018 à 2020, et 2021 à 2023 inclus. Ces catégories ont été choisies sur la base du tercile : un tiers environ des médecins et instructrices obtenaient leur diplôme pendant chacune de ces périodes.
Antécédents gynécologiques et résultats des couples traités
L’âge des deux membres du couple et les antécédents gynécologiques de la femme ont été tabulés.
La date de point de l’étude était le 31 décembre 2023 : tous les événements survenus jusqu’à cette date ont été pris en compte. Les couples qui ont tenté de concevoir à nouveau après une ou plusieurs fausses couches ont été conservés dans la cohorte. Le nombre de conceptions, potentiellement consécutives, de fausses couches ou d’accouchements depuis la première visite jusqu’à la fin de l’année 2023 ont été présentés dans un tableau.
La méthode Kaplan-Meier a été utilisée pour construire des graphiques de la probabilité cumulative de conception. Le test de Log-rank a été utilisé pour quantifier la significativité statistique de la différence de probabilité de conception en fonction des facteurs prédictifs suivants : Infertilité primaire ou secondaire, durée de la tentative de conception (années), fausse couche(s) antérieure(s), gravidité, âge de la femme (années), âge de l’homme.
Avis des médecins sur le bénéfice de cette éducation thérapeutique
La répartition des réponses concernant l’utilité de cette éducation thérapeutique pour leur pratique médicale a été tabulée. Un test de Kruskal-Wallis a été appliqué pour tester leur différence. L’ordre d’importance a été présenté sous forme graphique. Un test de Kruskal-Wallis a été appliqué pour tester la différence.
Toutes les analyses statistiques ont été réalisées à l’aide du logiciel R (version 4.4.1). Une valeur p de 0,05 a été considérée comme statistiquement significative.
Résultats
Médecins et instructrices formés sur le territoire de la France métropolitaine
Au total, 66 instructrices ont répondu au questionnaire. Parmi elles, 24 étaient des sages-femmes, 6 des pharmaciens, 6 des infirmiers, 4 d’autres professions paramédicales et 26 de profession non médicale. Tous étaient des femmes. Elles avaient entre 26 et 55 ans (min-max) au moment de la certification. Le premier tiers des instructrices a été certifié entre 2010 et 2017, soit sur une période de 8 ans. Un nombre égal a ensuite été certifié tous les 3 ans. Au cours de la même période, le nombre de médecins formés à la NaproTechnology a augmenté, comme le montre le nombre de points rouges dans la figure 1 : au cours des trois mêmes périodes, 7, 2 et 6 médecins français ont été certifiés en tant que conseillers médicaux FertilityCare, respectivement. Deux sont des hommes, les autres des femmes. Ils étaient âgés de 25 à 52 ans (min-max) au moment de la certification.

Fig. 1. Présence des instructeurs en fertilité dans les régions françaises à la fin de chacune des trois périodes consécutives. Les zones géographiques avec au moins un instructeur FertilityCare formé sont en vert, orange et bleu, respectivement à la fin de 2017, 2020 et 2023. Points rouges : médecins certifiés praticiens médicaux FertilityCare. (Pour l’interprétation des références aux couleurs dans la légende de cette figure, le lecteur se réfèrera à la version web de cet article.)
Comme le montre la figure 1, plus d’un tiers du territoire français a été progressivement couvert : à la fin de 2023, 36 des 96 zones géographiques (départements) de la France métropolitaine disposaient d’au moins une instructrice. Dans d’autres régions, il n’y a ni consultant médical ni instructrice certifiés FertilityCare. Enfin, dans certaines régions, la distance entre le lieu d’exercice des médecins certifiés FertilityCare et celui des instructrices est supérieure à 200 kilomètres.
Antécédents gynécologiques et pronostic
Antécédents gynécologiques
565 nouveaux couples ont été enregistrés en 2022 ou 2023. 14 (2,5%) ignoraient que la femme était déjà enceinte lors de la première visite. Seuls les 551 restants seront pris en compte dans la suite.
Le tableau 1 présente les caractéristiques médicales de base de ces 551 couples : Deux tiers d’entre eux souffraient d’infertilité primaire ; plus d’un tiers avait fait au moins une fausse couche ; 8 % avaient déjà suivi un traitement de fécondation in vitro (FIV) ; la durée des tentatives de conception était de 2 ans en moyenne, avec quelques extrêmes : quelques rares cas de durée très courte et d’autres cas de durée très longue, jusqu’à 12 ans.
Tableau 1. Caractéristiques initiales des 551 couples enregistrés en 2022 et 2023 et sans grossesse au moment de l’enregistrement.
Caractéristiques | Valeur | Résultat |
Âge de la femme | Moyenne (95% IC) Min Max | 33,06 (32,6 ; 33,52) 21 47 |
Âge de l’homme | Moyenne (95% IC) Min Max | 34,94 (34,39 ; 35,49) 22 55 |
Infertilité | Primaire Secondaire | 365 (66,4) 185 (33,6) |
Grossesse | 0 1 2 3 ou plus | 256 (46,5) 107 (19,5) 77 (14) 110 (20) |
Parité | 0 1 2 3 ou plus | 365 (66,4) 124 (22,5) 34 (6,2) 27 (4,9) |
Fausses couches | 0 1 2 3 ou plus | 352 (64) 87 (15,8) 68 (12,4) 43 (7,8) |
Interruptions de grossesses | 0 1 ou plus | 528 (96,2) 21 (3,8) |
Avortements médicaux | 0 1 ou plus | 544 (99,1) 5 (0,9) |
Mort fœtale in utero | 0 1 ou plus | 535 (97,6) 13 (2,4) |
Précédentes tentatives de FIV | Non Oui | 506 (92) 44 (8) |
Durée de la période d’essai de conception (en années) | Moyenne (95% IC) Min Max | 1,93 (1,79 ; 2,07) 0,17 12 |
Conceptions
Comme le montre le tableau 2, seules 4 d’entre elles ont été perdues de vue au cours de cette période. De leur inclusion dans le parcours de soins à la date de point de l’étude, fin de 2023, 204 des 547 femmes restantes (37 %) ont conçu au moins une fois. La figure 2 montre que tous les prédicteurs examinés étaient significativement associés au délai de conception : La probabilité de conception estimée par méthode actuarielle après un an pour les cas d’infertilité primaire et secondaire était d’environ 40 % et 60 %, respectivement ; pour les couples ayant déjà essayé de concevoir pendant 1 à 2 an et ceux qui avaient essayé 2 ans ou plus, la probabilité de conception était d’environ 50 % et 25 %, respectivement ; pour les couples sans antécédents de fausses couches, elle était légèrement inférieure à 40 % ; pour les autres, elle était d’environ 60 % à 70 %, quel que soit le nombre de fausses couches ; pour les couples sans antécédents de FIV, la probabilité de conception après un an était proche de 60 %, et elle était d’environ 25 % pour les couples ayant déjà tenté un traitement par FIV ; pour les femmes dont l’âge était supérieur à 40 ans, la probabilité de conception après un an était d’environ 30 % ; elle était comparable pour celles dont l’âge de l’homme était supérieur à 40 ans.
Tableau 2. Suivi des 551 couples enregistrés en 2022 et 2023. Statut à la fin de la période (au 15 janvier 2024).
Résultat | Premier essai | Deuxième essai | Troisième essai | Quatrième essai | Total |
Pas de conception | 347 | – | – | – | 347 |
Conceptions | 204 | 16 | 4 | 1 | 225 |
Fausse couche avant 12 semaines de gestation | 42 | 5 | 2 | 0 | 49 |
Fausse couche après 12 semaines de gestation | 2 | 0 | 0 | 0 | 2 |
Morts-nés | 1 | 0 | 0 | 0 | 1 |
Grossesses extra-utérines | 1 | 1 | 0 | 0 | 2 |
Naissances | 83 | 6 | 1 | 0 | 90 |
Grossesses en cours | 71 | 4 | 1 | 1 | 77 |
Statut inconnu | 4 | 0 | 0 | 0 | 4 |

Fig. 2. Probabilité de conception des couples qui reçoivent un conseil en fertilité et un traitement entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2023. La méthode Kaplan-Meier a été utilisé pour réaliser les graphiques. Le test Log-rank a été utilisé pour quantifier la signification statistique.
Le rapport de risques correspondant et des intervalles de 95 % de confiance sont montrés dans le Tableau 3.
Tableau 3. Rapports de risques (et intervalles de 95 % de confiance) pour la conception parmi les couples ayant reçu un conseil en fertilité et un traitement entre le 1er janvier 2022 et le 31 décembre 2023.
Indicateur | Catégories | Rapport de risques (intervalles de 95 % de confiance) |
Infertilité | Primaire Secondaire | 1 1,58 (1,21 ; 2,07) |
Durée de la période d’essai de conception (en années) | (0,17, 1] (1, 2] (2,12] | 1 0,71 (0,52 ; 0,98) 0,39 (0,26 ; 0,59) |
Fausses couches | 0 1 2 3 ou plus | 1 2,14 (1,5 ; 3,05) 2,02 (1,38 ; 2,95) 3,22 (2,2 ; 4,71) |
Précédente tentative de FIV | Non Oui | 1 0,45 (0,22 ; 0,91) |
Âge de la femme (en années) | (21, 30] (30, 40] (40, 47] | 1 0,88 (0,67 ; 1,15) 0,45 (0,25 ; 0,8) |
Âge de l’homme (en années) | (22, 30] (30, 40] (40,55] | 1 0,67 (0,5 ; 0,9) 0,58 (0,39 ; 0,86) |
Naissances
Comme le montre le tableau 2, sur les 204 conceptions au premier essai, 42 (20,5%) se sont soldées par une fausse couche avant la fin de la 12e semaine et 2 après 12 semaines de gestation ; de plus, 1 grossesse extra-utérine et 1 mort-né sont survenus ; pour les autres grossesses, 83 naissances ont eu lieu avant fin 2023 et 71 grossesses étaient en cours. Il y avait donc un total de 154 sur 204 (75,5%) d’évolution favorable à l’issue de la première conception.
Au total, sur l’ensemble du suivi, de la première à la quatrième tentative (en cas de trois fausses couches), 90 (16%) ont déjà donné naissance à un enfant en bonne santé fin 2023, et 77 (14%) attendent un enfant à la date de point, soit un total de 167 (30%) d’issues favorables pendant le temps de l’étude. Parmi ces grossesses, 10 (6%) ont été obtenues après une fausse couche et une après deux fausses couches.
Avis des médecins sur le bénéfice de cette éducation thérapeutique
Utilité du tableau d’observation du cycle au cours des consultations médicales.
Les médecins interrogés donnaient, sauf une exception, une note d’utilité de 4 ou 5 pour tous les domaines. Les différences entre domaines n’étaient pas statistiquement significatives (p value : 0.906).
Ordre d’importance
L’ordre d’importance de l’apport de l’enseignement thérapeutique était statistiquement différent selon les domaines (p value 0.02). L’aide au diagnostic et la reconnaissance du moment du cycle où les médicaments doivent être pris étaient priorisé par le plus grand nombre de médecins (voir Figure 3).

Fig. 3. Ordre d’importance de la contribution de l’éducation thérapeutique des patients aux soins médicaux.
Discussion
Plus de la moitié des instructrices interrogées, formées pour l’éducation thérapeutique en matière d’infertilité, avaient une formation initiale médicale, notamment de sage-femme. Un tiers des département français disposaient d’au moins une de ces instructrices. Les médecins interrogés jugeaient très utile l’éducation thérapeutique et le tableau du cycle apporté par les femmes ayant reçu cette éducation thérapeutique. Ce graphique leur était en priorité utile pour le diagnostic des causes de l’infertilité et pour la reconnaissance du moment du cycle où les médicaments doivent être pris. Trente-sept pourcent des couples pris en charge ont conçu un enfant avant la date de point. Parmi eux, 75% avaient une grossesse évolutive ou déjà une naissance vivante. Les facteurs significativement prédictifs de conception était l’infertilité secondaire, une durée de l’infertilité de moins d’un an, un antécédent de fausse-couche, l’absence d’antécédent d’échec de fécondation in vitro, un âge inférieur à 40 ans et un âge du conjoint de moins de 30 ans. Cependant, la probabilité de conception était proche d’un quart dans des cas réputés peu favorables, notamment lorsque l’infertilité durait depuis plus de deux ans et chez celles qui avait eu un échec de fécondation in vitro ou étaient âgées de 40 ans ou plus.
Ces résultats soulèvent trois questions : 1) celle de l’utilité du tableau d’observation du cycle pour le suivi des couples hypofertiles ; 2) celle de l’apport des instructrices en fertilité ; 3) celle de la participation des médecins généralistes à ce parcours.
Utilité du tableau d’observation du cycle pour le suivi des couples hypofertiles
Les médecins interrogés dans cette étude témoignent de l’utilité du tableau du cycle pour leur pratique. Le manque de connaissance des couples concernant la fertilité est signalé par plusieurs auteurs2,3. Cela manque tout autant au diagnostic, à la réalisation des procédures diagnostiques et thérapeutiques qu’à la connaissance des effets des traitements. Plusieurs publications récentes ont plaidé en faveur de l’utilisation du tableau d’observation du cycle féminin pour le diagnostic de causes d’infertilité11,14. Les résultats de cette étude vont dans le même sens.
Apport des instructrices en fertilité
La participation d’instructrices en fertilité au parcours de soin des couples hypofertilité entre dans le domaine de l’éducation thérapeutique. Selon la définition de l’Organisation Mondiale de la Santé, « l’éducation thérapeutique du patient est un processus d’apprentissage structuré et centré sur la personne, qui aide les personnes atteintes de maladies chroniques à gérer elles-mêmes leur santé en s’appuyant sur leurs propres ressources, avec le soutien de leurs soignants et de leurs familles. »19 L’éducation thérapeutique est promue dans les pathologies chroniques, ce qui est généralement le cas de l’infertilité. C’est le cas par exemple dans l’ovarite polykystique et l’endométriose, deux pathologies fréquemment observées chez les femmes suivi pour infertilité. Ce sont des domaines pour lesquels l’éducation thérapeutique semble très adaptée20. Elle est notamment susceptible de favoriser l’adhésion au traitement ainsi que la décision partagée. La décision partagée est particulièrement désirée en matière d’infertilité21–23. Cependant, pour qu’elle soit vraiment partagée il est nécessaire que la patiente soit correctement informée. Des instructrices formées peuvent assurer cette mission, en lien avec les médecins.
Participation des médecins généralistes au parcours de soin des couples infertiles
Le résultat de plusieurs cohortes de couples hypofertiles pour lesquels des médecins généralistes ont participé à la prise en charge diagnostique et thérapeutique ont été publiées9,16,17. Ils sont favorables. Les résultats de l’étude présentée ici leurs sont comparable. L’adhésion du couple au suivi médical est, dans bien des domaines, favorisée par la participation de médecins généralistes à la prise en charge24. De plus, de nombreuses affections chroniques, qui ne ressortent pas directement de la spécialité gynécologique, affectent la fertilité. Il a été montré que leur prise en charge permet d’obtenir des grossesses. C’est notamment le cas du traitement du surpoids et plus généralement de la maladie métabolique. C’est aussi le cas du traitement de l’insuffisance lutéale. De plus, il est reconnu que les patients doivent attendre un, voire deux ans s’ils sont jeunes, avant de recourir à l’insémination artificielle ou à d’autres techniques. Ce temps d’attente peut être mis à profit pour chercher des causes diminuant la probabilité de conception et les traiter25. Les médecins généralistes formés à cette prise en charge peuvent ainsi participer utilement au parcours de soin des couples hypofertiles.
La principale limite de cette étude est d’être observationnelle. Elle ne peut donc prétendre affirmer que l’éducation thérapeutique a été favorable, ni celle de la participation des médecins généralistes. Mais elle présente la satisfaction des médecins dont les patientes ont tenu un graphique d’observation du cycle et ont reçu une éducation thérapeutique. Elle montre aussi qu’un tiers des couples pris en charge de cette manière ont eu une issue favorable pendant l’étude. Ce type de suivi apparait susceptible de favoriser l’adhésion au traitement et une décision partagée, grâce à l’éducation thérapeutique. Elle augmente la probabilité d’une prise en charge des affections chroniques qui sont bien mises en évidence lors d’un suivi pour infertilité.
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