Les Français et l’IVG

En janvier 2025, l’IFOP a réalisé un sondage pour l’association Alliance Vita : Le regard des Français sur l’interruption volontaire de grossesse.
Les résultats du sondage montrent que, même si une petite majorité des Français trouve normal le grand nombre d’avortements ayant lieu chaque année en France, une très grande majorité pense que l’avortement n’est pas anodin et que l’on devrait prendre des moyens pour l’éviter.
L’IVG aux yeux des Français : un acte « normal » mais pas anodin
La majorité des Français estime qu’avorter est un droit. 54 % des sondés considèrent comme normal le nombre de 243 623 IVG qui ont eu lieu en 2023 en France (pour 677 800 naissances), car « avorter est un acte auquel les femmes peuvent être exposées au cours de leur vie. »
46 % des Français estiment tout de même que ce nombre est « préoccupant car avorter reste un acte que l’on préfèrerait éviter ».
Pour autant, les 54 % de Français qui ne sont pas choqués par le nombre d’avortements ne pensent pas tous que l’IVG est anodine : en effet, 88 % des Français – et 91 % des Françaises – estiment qu’« un avortement laisse des traces psychologiques difficiles à vivre pour les femmes. »
L’aide pour les femmes enceintes
Une majorité de Français (65 %) pense que l’on devrait aider les femmes enceintes qui envisagent l’avortement à l’éviter.

Ils sont plus nombreux encore (80 %) à penser que le livret remis aux femmes qui se renseignent sur l’IVG devrait comporter des informations détaillées sur les aides aux femmes enceintes et aux jeunes mères, proposées en France. Rappelons que jusqu’en 2001, la loi exigeait que ces informations soient remises aux femmes qui envisagent l’avortement. Depuis que la loi ne l’exige plus, ces informations ne sont plus données aux femmes de peur qu’elles les perçoivent comme une pression pour ne pas avorter.
81 % des Français estiment que les pouvoir publics devraient vraiment s’intéresser à la prévention de l’avortement et faire une étude pour connaître les causes, les conditions et les conséquences de l’IVG.
Les propositions d’Alliance Vita pour la prévention de l’IVG
Alliance Vita estime que les politiques de santé françaises sont gravement défaillantes en négligeant toute prévention de l’IVG. L’association indique plusieurs domaines dans lesquels les pouvoirs publics devraient agir pour mettre en place cette politique de prévention :
1. L’information sur l’efficacité réelle de la contraception et ses échecs potentiels
Alliance Vita pointe le fait que 72 % des femmes qui avortent utilisaient un moyen de contraception au moment où a débuté leur grossesse. La promotion de la contraception n’est pas un moyen efficace pour éviter les IVG. Aucune méthode de contraception n’est efficace à 100 %. Au contraire, le fait de se sentir « protégés » de toute grossesse par la contraception fait que les couples ne sont pas du tout prêts à l’éventualité d’une telle grossesse, et celles-ci aboutissent très fréquemment à un avortement.

Prendre conscience que tout rapport sexuel peut conduire à une conception pourrait permettre d’avoir plus de prudence dans le choix des personnes avec qui avoir des rapports sexuels, et aussi permettre aux couples d’être mieux préparés à accueillir un éventuel événement inattendu.
Rappelons aussi que de nombreux moyens de contraception provoquent des avortements en début de grossesse, à l’insu de la femme qui les utilise.
2. L’aide aux femmes enceintes
Alliance Vita cite une étude1 montrant que les femmes ayant le plus recours à l’avortement sont celles dont le niveau de vie est le plus faible. Comment faire pour éviter que les femmes soient acculées à faire des IVG à cause de la pauvreté ou de la précarité ? Les aides pour femmes enceintes et parents en difficulté sont indispensables pour éviter que le recours à l’IVG soit une question de difficultés financières et d’inégalités sociales. Il faut que les aides soient suffisantes, et il faut que les femmes soient informées de ces aides, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui.
3. La protection des femmes face aux violences qu’elles subissent pour les forcer à avorter
Alliance Vita mentionne des études2 montrant le lien entre les violences conjugales et des avortements à répétition. L’association déplore que ce lien entre IVG et violence soit trop peu approfondi, et que très peu de médecins demandent aux femmes qui font une IVG si elles sont victimes de violences.
Alliance Vita pointe aussi le fait que, sur les 201 000 femmes victimes chaque année de violences conjugales, 40 % ont commencé à subir ces violences lors de leur première grossesse.
4. Le refus des pressions sur les femmes dans le milieu médical et chez les acteurs sociaux

Alliance Vita préconise une formation des personnels médicaux et des travailleurs sociaux pour éviter toute forme de pressions sur les femmes enceintes.
Pour l’association, le manque d’écoute des femmes qui envisagent d’avorter est déjà une forme de pression. Mais il y a aussi des pressions directes : selon l’enquête Ifop pour le Planning Familial en 2024, 29 % des femmes ayant eu une IVG ont ressenti une pression pour avorter lors de leur rencontre avec le professionnel de santé.
5. La revalorisation de la politique familiale
Alliance Vita estime enfin que la politique familiale devrait être revalorisée, et en particulier rendre possible le fait de concilier études et vie familiale, pour donner une possibilité aux étudiantes enceintes de garder leur bébé tout en continuant leurs études. L’association signale que 85 % des grossesses non planifiées qui surviennent au cours des études aboutissent à un avortement.
Conclusion
On peut donc constater que, même si la majorité des Français est favorable au « droit à l’IVG », ceux-ci voudraient que les femmes qui souhaitent garder leur bébé puissent le faire. C’est pourquoi il est urgent d’une part de lutter contre les pressions qui sont exercées sur ces femmes, que ce soit de l’entourage ou des professionnels médicaux ou sociaux, d’autre part d’aider les femmes enceintes et les parents en difficulté, d’aider les femmes enceintes sans emploi, les femmes enceintes seules, les femmes enceintes étudiantes… Il est aussi urgent de faire connaître les aides qui existent déjà : n’hésitez pas à faire connaître notre article Les aides aux femmes enceintes, mères célibataires et parents en difficulté. Il faut faire connaître les aides qui sont proposées pour les parents et pas uniquement les aides pour la grossesse, car les femmes enceintes en difficulté appréhendent l’avenir et se posent souvent la question de leur capacité matérielle à élever un enfant.
Il est important aussi d’apporter aide et soutien aux femmes qui souffrent suite à une IVG. Comme le pensent 91 % des Françaises, l’avortement n’est pas un acte anodin. Comment le serait-il quand il s’agit de supprimer la vie de son propre enfant ? Le regret de l’IVG est fréquent, et même en l’absence de regret, des conséquences peuvent se produire sur la santé psychique des femmes qui ont avorté, et des hommes dont l’enfant a été avorté. Ces conséquences sont niées en France par les pouvoirs publics : le site officiel sur l’avortement affirme que « de nombreuses études scientifiques fiables ont montré que l’IVG n’est pas à l’origine de troubles psychologiques spécifiques. ». Ce site propose pourtant un accompagnement psychologique, pour celles qui en ont besoin après l’IVG. Mieux vaut être soutenu par des personnes qui ne nient pas les conséquences psychologiques de l’IVG et se tourner vers des associations d’aide aux personnes ayant avorté.
Notes
1 Drees, L’état de santé de la population en France, Septembre 2022
2 EM-consulte, Existe-t-il un lien entre les violences conjugales et les interruptions volontaires de grossesse répétées ?, 18 août 2017