On ne peut se dire féministe quand on est favorable à la GPA
Une tribune de Blanche Streb dans le quotidien « La Croix » du 13 septembre 2023
Docteure en pharmacie, Blanche Streb est essayiste et directrice de la formation d’Alliance VITA.
Dans une récente déclaration, le ministre des transports Clément Beaune s’est prononcé en faveur de la légalisation de la GPA. Blanche Streb propose une réflexion sur ce que « porte en elle » la GPA et rappelle la violence de la marchandisation du corps de la femme.
La gestation pour autrui (GPA) revient régulièrement sur le devant de la scène. Et c’est à Clément Beaune, ministre des transports, qui se montre favorable à sa légalisation, que l’on doit le dernier soubresaut. Ces dernières années, toutes sortes de pièges émotionnels et dialectiques destinés à habituer l’opinion ont ronronné : films, séries, magazines affichant sur leurs couvertures glamours des « people » qui y ont eu recours à l’étranger et ne se cachent même plus…
Certains aimeraient qu’enfin « la société soit prête » quand d’autres nous présentent la GPA de manière édulcorée, comme un progrès, un sens de l’histoire ou une question d’égalité. Faudrait-il alors se faire à l’idée, détourner les yeux ? Après tout, chacun fait bien ce qu’il veut… Dans un contexte où on confond discernement et jugement, et où l’autocensure guette, par peur, il peut sembler difficile de préserver sur ces sujets une liberté intérieure. Mais quand on commence par ne plus oser dire, on finit par ne plus oser penser.
Un enjeu d’humanité
Que porte en elle la GPA ? Rien de moins qu’un enjeu d’humanité qui concerne chacun : la manière dont on veut que notre société conçoive, respecte et regarde l’enfantement. Face à la fascination de la technique, aux logiques de marché, aux pressions de l’individu-aux-désirs-tout-puissants, qu’est-ce encore que donner la vie à un enfant ? Qu’est-ce que le donner à sa vie ?
En réalité, quels qu’en soient les raisons et l’amour qui précède aux intentions, avec la GPA, on ne donne pas la vie, on la prend. Les commanditaires – et toute une chaîne de production dont la mère porteuse est l’essentiel, mais pas unique maillon – combinent à l’avance la conception d’un enfant et son abandon par celle en qui sa vie aura pris corps.
Un paradoxe idéologique
Peut-on se dire humaniste quand on est favorable à une pratique qui regarde l’humain – femme et enfant – comme un moyen ? Tolérer la GPA, c’est admettre comme licite la transaction préméditée d’un être humain. Gratuit ou payant, qu’est-ce que ça change pour l’enfant ? Le simple fait qu’il soit « remis » le chosifie. Lui qui doit grandir et se construire au sein d’une femme, aussi dévouée soit-elle, contrainte à vivre sa grossesse sans s’attacher. Faisable, pour lui comme pour elle, nous dit-on. Mais est-ce humain ? Grossesse et conception ne sont pas des étapes transparentes de notre vie, elles en écrivent les premières lignes.
Peut-on se dire féministe quand on est favorable à une pratique qui mine les droits des femmes ? Tolérer la GPA, c’est accepter les mécanismes d’exploitation des femmes qu’elle exige. Et pas seulement de celles qui deviennent enceintes et accouchent, mais aussi, on les oublie souvent, de celles qui, pour satisfaire certains processus de fabrication, deviennent pourvoyeuses d’ovocytes, souvent pour de l’argent. Consentement, liberté, don, pressions financières ou gratuité… Les conditions qui préexistent à un contrat de GPA n’en effacent jamais les contraintes pour les femmes : violences médicales pour mettre en place ces grossesses atypiques, atteintes à leurs libertés, leur intimité, risques accrus d’hypertension, de complications, de souffrances physiques, psychiques, sexuelles, anxiété, dépression…
Une question éthique
Cette fabrication de la vie à tout prix ne cesse de révéler ses inextricables sombres côtés, à mesure que ce marché se mondialise. Pays riches, pays pauvres, même constat : chacun rapporte régulièrement des faits divers déchirants. Ça se passe bien, parfois, souvent, nous dit-on, mais est-ce humain ? En 2022, le Parlement européen a réitéré sa condamnation : « L’exploitation sexuelle à des fins de gestation pour autrui et de reproduction est inacceptable et constitue une violation de la dignité humaine. »
Peut-on se dire progressiste quand on est favorable à une pratique entraînant une telle régression humaine ? Modernité ou pas, rien n’a changé, l’être humain a besoin d’enracinements. Un bébé a besoin de sa mère. Dès la naissance, il cherche sa présence. Il sait qui elle est, qui elle n’est pas. Qu’on y accole l’adjectif « porteuse » ou qu’on lui dénie d’être une mère biologique – malgré neuf mois d’intense communion physique, biologique, psychique et émotionnelle qui laisseront à vie des traces – n’y change rien.
La GPA est politique
Tolérer la GPA, c’est planifier sa conception au travers d’un éclatement de sa filiation et d’une relative ou définitive séparation. Parfois même, c’est effacer purement et simplement « maman » de l’histoire de l’enfant. Arracher un nouveau-né au seul univers qu’il connaît, voix, odeurs, bruits du cœur, c’est l’amputer durablement et imprimer au fer rouge un traumatisme dans son psychisme. Pas par un accident de la vie, ce qui peut arriver et qu’on essayera de réparer, mais par une décision d’adultes sur lui, un préjudice orchestré. Un récit auquel il faudra bien consentir pour construire sa vie, jaillie d’une injustice. C’est supportable, c’est surmontable, nous dit-on, mais est-ce souhaitable ?
La GPA n’est pas inéluctable. C’est une question de volonté politique, mais, avant cela, d’un combat culturel. Il n’y a pas de sens de l’histoire, juste des hommes et des femmes qui font, ou défont, l’histoire.
Voici une bonne nouvelle en la matière :
« GPA : les députés européens se prononcent en faveur de son interdiction dans l’UE »
https://www.tf1info.fr/international/gpa-interdite-europe-les-deputes-europeens-se-prononcent-en-faveur-de-l-interdiction-de-la-gestation-pour-autrui-dans-l-ue-2272071.html
On ne peut que se féliciter de ce vote, qui manifeste une volonté commune claire contre cette pratique dans l’Union européenne. C’est un signal pour le reste du monde.
je crois qu’on a laissé trop faire ces expériences pour les femmes qui n’arrivaient pas avoir d’enfants , puis toutes ces célibataires en mal d’enfants , alors qu’il y a tant d’abandons , c à double tranchant , les enfants adoptés veulent connaître leurs vrais parents comment feront-ils ces
orphelins de pères ??